Repenser les directions juridiques en mode Agile

La flexibilité dans le nouveau monde du travail juridique

Lorsque l’on évoque la flexibilité dans le monde du travail, on pense d’abord à la flexibilité du temps de travail. Mais aujourd’hui le vrai débat porte sur la flexibilité dans l’organisation même du travail. Concernant le travail des cadres, la problématique est si vaste qu’en raccourcissant on peut se poser la question suivante : doit-on continuer à construire des sièges sociaux coûteux pour y accueillir les salariés, que ce soit de manière permanente ou même de manière occasionnelle (en mode bureau de passage, etc.) ?

Les possibilités ouvertes par la crise sanitaire sont en effet infinies.

Désormais, beaucoup de salariés, et notamment les juristes, pourront travailler à distance sans même avoir réellement besoin de passer au bureau régulièrement. Surtout, il a été démontré la possibilité de travailler à distance en grand nombre autour d’un même projet. Le management de projet, et le management tout court, ont été révolutionnés. Emmanuel Abord de Chatillon et Damien Richard, enseignants en management, ont exposé ce phénomène dans un article publié sur le site The Conversation.com. En ce qui les concerne, les juristes n’ont plus besoin de participer physiquement à des réunions interminables de négociation et de mark-up de contrat. Ils n’ont plus besoin non plus de se déplacer pour des comités exécutifs ou des CODIR. Les réunions de départements juridiques peuvent désormais se tenir à distance, chacun ayant appris à manier de nombreux outils collaboratifs (Teams, Zoom, etc.). À cet égard, Marion Perroud, journaliste spécialiste des questions emploi, droit du travail et politiques RH, a résumé les avantages et les questionnements que suscite le télétravail dans un article de Challenges.fr.

Mais l’enseignement essentiel de cette période a été la démonstration flagrante qu’il n’est plus nécessaire pour le juriste d’habiter à proximité de son entreprise. En effet, on concevait auparavant le travail à distance comme une autorisation donnée au salarié de travailler depuis son domicile, par hypothèse, situé à quelques kilomètres de son lieu de travail. Désormais, il est possible d’envisager de collaborer avec des juristes situés à des centaines, voire des milliers de kilomètres, sans autre limite que les fuseaux horaires. Cette révolution, encore à peine perceptible, va radicalement modifier la constitution, le recrutement, le management, et le fonctionnement même des équipes juridiques.

Comment mieux utiliser un juriste à distance ?

On verra ainsi des équipes juridiques historiquement situées en France se composer demain de juristes assis à l’autre bout du monde, partageant quotidiennement leur savoir-faire, leur expérience, leur culture lointaine. Cette augmentation considérable de la vitesse des échanges, de l’intensité des analyses juridiques et surtout de l’incroyable capacité à multiplier les points de vue en temps réel, va permettre d’accroître significativement la force d’une direction juridique.  Et si cela permettait à l’humain de rivaliser avec ce que l’IA nous promettait ? Dans un temps au moins… En effet, il n’existe pas encore de système d’IA juridique capable de mixer droit français, droit suisse, droit américain et droit chinois, alors que désormais au quotidien des équipes juridiques pourront discuter dans ces différents systèmes de droit et décider d’une solution sécurisée immédiate.

Il est amusant de voir que ses capacités techniques existaient déjà en partie, mais qu’une fois de plus c’est une crise profonde qui a révélé leur pertinence. Et surtout leur véritable puissance : désormais il n’est plus nécessaire de vouloir recruter en France un spécialiste du droit anglo-saxon, profil rare et cher, quasi introuvable. Il suffira d’avoir dans son équipe un anglo-saxon, assis au Texas ou à Londres, joignable aussi facilement que les autres membres de l’équipe.

Ce changement de dimension dans l’approche de la constitution des équipes juridiques doit être pris en compte très rapidement par le directeur juridique. Particulièrement à une époque où des restrictions budgétaires fortes impacteront probablement le recours aux cabinets étrangers.

Quel sera le nouveau profil du juriste à distance ?

Si l’on mixte cette capacité d’intégrer des juristes de l’autre bout du monde dans des discussions quotidiennes avec les facultés qu’offrent le recours au temps partagé, ce sont autant de possibilités qui s’ouvrent désormais aux directions juridiques. On pourra ainsi avoir le lundi en ligne son juriste américain, le mardi son juriste indien, le mercredi son juriste chinois… Cela annonce-t-il enfin la réalisation du rêve de certains, un travail juridique permanent « Over the Clock » qui permettra que la réflexion juridique soit quasi permanente, comme bien entendu dans les autres centres de réflexion, de veille et d’action de l’entreprise ?

Désormais, on jugera un juriste à distance à sa capacité à travailler selon ce modèle comme on juge un juriste traditionnel à travailler au milieu d’une équipe. En tout état de cause, les discussions interminables avec la DRH pour qu’un juriste de l’équipe puisse partir s’installer à Lille ou à Marseille sont révolues. Ainsi, seul l’engagement personnel du salarié à distance sera pris en compte et non plus la pertinence même de ce modèle de travail.

Mais pour autant des critères d’évaluation nouveaux d’un juriste vont émerger. On appréciera sa maîtrise des outils collaboratifs, on appréciera sa capacité à animer des réunions en visio, on appréciera sa capacité à manager à distance, on appréciera sa disponibilité à distance…

Parce que ce changement est inéluctable, nous avons depuis quelques temps créé une nouvelle offre de services juridiques, entièrement à distance, et par abonnement.

Quelles sont les possibilités qu'offre un abonnement ?

Cette formule offre la possibilité de recourir à un juriste à distance (en réalité un juriste à distance maîtrisant tous les outils collaboratifs nécessaires) en fonction des besoins du moment. L’entreprise cliente paye alors un horaire fixe et forfaitaire mensuel pour recourir à ce juriste lorsqu’elle en a besoin, et le prix est fonction d’une une combinaison séniorité/spécialité/volume déterminée à l’avance et qui peut être revue régulièrement.

Notre expérience du management de transition juridique « classique » adapté aux fonctions juridiques de grands groupes comme de start-up est aujourd’hui telle qu’elle nous permet de proposer cette offre nouvelle en s’appuyant sur la démonstration que la crise a offerte à chacun de la pertinence du modèle et en utilisant les nouveaux outils collaboratifs disponibles et désormais maîtrisés par tous nos intervenants.

Certes, il est parfois nécessaire de recourir à un CDI ou un CDD pour bénéficier de l’aide d’un juriste supplémentaire, qu’il soit junior, middle ou senior. Certes, il est toujours pertinent de recourir à un manager de transition juriste, à temps plein ou même à temps partiel, présent dans les locaux de l’entreprise, lorsque cette solution, est adaptée. Le cabinet DESCLÈVES & Associés la rend possible en France depuis 2015.

Mais nous avons encore élargi les champs du possible et l’entreprise peut aussi recourir un abonnement juridique lui permettant de confier ses dossiers à chaque fois qu’elle le souhaite à un juriste ou un avocat à distance, ponctué de rencontres physiques lorsque cela est nécessaire. L’entreprise peut ainsi multiplier les matières techniques dont elle a besoin régulièrement sans plus se soucier des contraintes que lui imposent le nombre limité de postes d’embauche ouverts ou de profils disponibles sur le marché local. L’entreprise pourra désormais recourir pour un petit nombre d’heures à son propre juriste interne spécialisé sur une matière précise, à un autre juriste spécialisé sur une autre matière, etc. et multiplier ce principe autant qu’elle le souhaitera. La rigidité de la composition d’une équipe juridique est ainsi totalement repensée.

Notre offre Legal as a Service, pour quelles sociétés ?

Convaincus que ce principe deviendra la norme, nous avons créé une offre moderne et agile qui permet, par un simple abonnement, d’intégrer dans une équipe locale d’autres juristes disponibles localement mais à distance, aussi bien que des juristes lointains, qu’ils soient généralistes ou spécialisés.

Notre offre, Legal as a Service, est disponible pour les sociétés de toute taille. Elle intéresse bien sûr les start-ups, les PME et les ETI pour tout ou partie de leurs besoins juridiques, mais aussi les grandes entreprises pour des besoins spécifiques non répondus par le marché, comme le recours à une expertise juridique rare. Qu’il s’agisse de gérer sur le long terme un pan spécifique de l’activité : un abonnement pour le droit des sociétés, pour le droit boursier, pour les contrats d’achats, pour le contentieux… Mais aussi pour un projet moyen terme : un abonnement pour gérer pendant quelques mois un projet de développement spécifique pour lequel une création de poste n’est pas envisageable ; une démission soudaine et l’obligation de continuer le service ; une attente d’embauche… qui ne peut pas attendre. Et même un projet à l’étranger nécessitant un juriste expert dans un droit étranger…

Arnaud DESCLÈVES
Associé du Cabinet DESCLÈVES & Associés